VU À L'ÉTRANGER Bageno au coeur du bio européen

Bageno est la plus ancienne coopérative allemande bio, souligne Berthold Walter, directeur général. La collecte de céréales bio a démarré en 1964, quelques adhérents s'étant déjà convertis. Un besoin se faisait également sentir au niveau de nos clients habituels, notamment les floconniers pour la production de mueslis. La coopérative a alors accompagné ses adhérents dans cette voie. Beaucoup de nouveaux adhérents nous ont rejoints, convaincus du bien-fondé de notre démarche et de notre savoir-faire. Bageno a ainsi été très active lors du développement de l'agriculture biologique allemande. Aujourd'hui, elle reste encore pionnière dans ce secteur très spécifique. » La coop compte environ 600 adhérents bio dont 70 en grandes cultures, surtout spécialisés en production Demeter (agriculture biodynamique). « Nous sommes encore à ce jour l'un des tous premiers centres de collecte de céréales Demeter dans le sud de l'Allemagne. »

La coop s'approvisionne aussi chez d'autres coopératives voisines du groupe Raiffeisen (union de coopératives à laquelle elle appartient), voire auprès d'autres régions allemandes ou à l'étranger. Ceci pour satisfaire la demande, supérieure à la production des adhérents.

« L'importation est également nécessaire pour couvrir des besoins en protéines de soja, car la production allemande est très faible. » Au final, Bageno commercialise environ 50 000 t de graines biologiques.

Organisation rigoureuse et parfaite maîtrise

Collecter et vendre à la fois des graines bio et conventionnelles demande une organisation rigoureuse et une parfaite maîtrise de la traçabilité. La collecte est totalement séparée au niveau des lieux de stockage : deux silos d'une capacité de 30 000 t sont exclusivement dédiés au bio. Ils sont contrôlés deux fois par an par le certificateur national BCS Öko-Garantie, de même que tous les adhérents bio, les multiplicateurs de semences, les aliments bio fabriqués par Bageno, les flux d'importation et d'exportation, ainsi qu'une partie des fournisseurs.

Un traitement spécifique de la récolte bio

« Nos outils sont spécialement équipés pour préserver la qualité des céréales biologiques (ventilation, refroidissement). Nous disposons d'une tour pour le traitement des céréales au gaz carbonique, procédé homologué pour la désinsectisation des lots de céréales biologiques. » Au final, le coût de traitement de la collecte bio de ses adhérents est, selon les variétés, 40 à 60 % plus élevé que celui des céréales conventionnelles. « Nous parvenons à les vendre 50 à 65 % plus cher, mais la concurrence est de plus en plus rude au niveau des prix. » L'essentiel est destiné au marché allemand.

La gamme proposée par Bageno est très large : blé meunier, sarrasin, épeautre, seigle, blé dur, orge brassicole, avoine blanche, tourteaux, huiles… Les principaux clients sont les éleveurs, les fabricants d'aliments du bétail, la meunerie, la nutrition infantile avec Hipp et Nestlé et des sociétés comme SLP (leader du décorticage d'épeautre) ou Kramerbräu (décortiquage de graines de tournesol et de lin bio pour les pains multicéréales). « En tant que pionnier, nous avons été rapidement sollicités par des transformateurs hollandais, autrichiens, belges, luxembourgeois, français, anglais et même japonais… notamment grâce à notre logistique performante et notre maîtrise de la traçabilité. »

Vers un équilibre du marché

A l'heure actuelle, vu les importations importantes de céréales bio en Allemagne et les surfaces en production, la demande n'est plus supérieure à l'offre. « C'est pourquoi nous développons la production seulement pour répondre à un besoin identifié, voire même contractualisé, avant le semis. Cette démarche est essentielle pour ne pas déséquilibrer le marché. » Quant à l'export, les autres pays européens sont de plus en plus autonomes, mais la demande reste encore globalement supérieure à l'offre. Bageno utilise également une partie de la collecte pour élaborer une gamme d'aliments bio (15 000 à 20 000 t/an) revendus directement aux adhérents, ainsi qu'aux partenaires allemands ou étrangers du groupe Raiffeisen, comme Partner & Co, en France.

Chantal Urvoy